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Violences sexistes et sexuelles – Les propositions du PS : la convention Le temps des femmes

De l’origine des violences sexistes et sexuelles à leur reconnaissance institutionnelle l’exposé d’un lent processus. Nous vous proposons une série d’articles :

En France, plus de 210 000 femmes sont victimes de violences physiques et/ou sexuelles de la part de leur conjoint ou ex-conjoint tandis que70% des plaintes pour violences sexuelles sont classées sans suite.

Ces chiffres, bien que particulièrement alarmants, illustrent toutefois la vague de dénonciations permise par le mouvement MeToo. Le défi qui s’ouvre est désormais celui des solutions. Elles existent, mais leur nature doit être consensuelle et leur mise en œuvre impulsée par une réelle volonté politique.

C’est la raison pour laquelle le Parti socialiste œuvre en faveur d’une véritable transition féministe, « parce que le temps des femmes est venu ». Afin de rompre avec l’ordre patriarcal établi et pour parvenir à une égalité réelle entre les femmes et les hommes, la convention « Le temps des femmes » soumet une série de propositions engageantes.

En matière de lutte contre les VSS, ladite convention ambitionne de mener une politique enfin à la hauteur contre ces violences infligées aux femmes et aux filles.

Pour améliorer la prise en charge des victimes d’abord.

Par le développement des dispositifs de signalement. Ils peuvent prendre la forme de dispositifs d’alerte dédiés ou de cellules d’écoute, et permettent aux personnes de signaler un comportement discriminatoire ou des VSS dont elles auraient été victimes ou témoins. Sur le lieu de travail par exemple, tout employeur public ou privé est légalement tenu de prendre toutes les dispositions nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des salariés ou des agents publics.

Ces dispositifs sont d’ores et déjà instaurés dans plusieurs structures. Dans le secteur privé, toutes les entreprises de plus de 50 salariés ont l’obligation depuis 2016 de se doter de tels mécanismes. Dans la fonction publique, cette obligation concerne tous les employeurs.

Toutefois, le Défenseur des droits constate que les dispositifs d’alerte internes sont rarement saisis. Ce constat peut s’expliquer soit par un manque d’information, soit par un manque de confiance envers les garanties d’impartialité et de confidentialité qu’ils offrent, soit encore du fait des doutes quant à leur efficacité.

Par le triplement des places d’hébergement spécialisées.

Pour faire cesser les violences, une seule solution s’impose souvent pour les femmes : la décohabitation. En l’état, 1 femme victime sur 6 (soit 20 000 d’entre elles) auront besoin d’accéder à un hébergement dans le parc social. Or, au 31 décembre 2021, ce parc contient 7 820 places.

In fine, la Fondation des Femmes note que seules environ 12% des demandes d’hébergement effectuées par les femmes victimes de violences mènent à une place adaptée à leur parcours.

Cette insuffisance d’hébergement affaiblit considérablement leur protection, voire les met en danger. En découle un rallongement des parcours de sortie des violences, davantage de retour chez le conjoint et des femmes qui ne quittent pas leur domicile faute de solution.

Par l’instauration d’espaces spécifiques au sein des commissariats et des brigades de gendarmerie pour l’accueil et l’écoute des victimes.

En effet, l’accès au service public policier est un enjeu essentiel puisque le premier contact avec les forces de l’ordre conditionne la confiance envers l’institution.

L’étude « Solliciter les forces de l’ordre : Évolutions et inégalités relatives à l’accès au service public policier » fait pourtant état de difficultés : stéréotypes de genre, concentration des efforts sur l’intervention et la judiciarisation, … Ces dernières contribuent à maintenir un écart entre les besoins des victimes et les réponses concrètes apportées.

Pour mieux rendre justice aux victimes ensuite.

Par la mise en place de tribunaux et de brigades spécialisées pour les violences faites aux femmes. A titre d’exemple, l’approche espagnole est jugée « novatrice et performante » par Marie-Pierre Badré, la présidente du centre Hubertine Auclert, qui lutte contre les inégalités et les discriminations fondées sur le sexe et le genre.

En effet, le nombre de féminicides en Espagne a chuté de 25% depuis 2004. Plusieurs explications peuvent être avancées pour expliquer cela.
En premier lieu, un cadre légal plus protecteur. La loi-cadre « Mesure de protection intégrale contre les violences conjugales » datant de 2004, a été complétée en 2017 par une loi « pacte d’Etat ». Ces lois se traduisent notamment par des équipes de police spécialisées et référentes, des tribunaux spécialisées pour traiter des violences de genre avec des compétences pénales et civiles et la possibilité offerte à la victime de bénéficier de l’autorité parentale exclusive.

En second lieu, un budget plus conséquent alloué à la cause. Selon un rapport de la Fondation des Femmes, l’Etat français a dépensé 184,4 millions d’euros en 2023 pour lutter contre les violences faites aux femmes lorsque le gouvernement espagnol mobilise quant à lui 748 millions d’euros chaque année. Cela représente 16 € par an et par habitant, contre 5 € seulement en France.

Par la reconnaissance de l’amnésie traumatique, aussi appelée « amnésie dissociative ».

Est entendue comme telle, l’incapacité de se souvenir en totalité ou en partie d’éléments importants d’un événement traumatisant. L’amnésie peut durer plusieurs semaines, plusieurs années voire plusieurs dizaines d’années.

En 2015, le rapport « Impact des Violences Sexuelles de l’Enfance à l’âge Adulte » (IVSEA) publié par l’Association Mémoire Traumatique et Victimologie qualifie les violences sexuelles comme l’un des événements traumatiques les plus graves, avec le plus grand impact psycho traumatique. Ces violences représentent les situations les plus à risque de provoquer des amnésies traumatiques, notamment lorsque celles-ci ont été commises dans l’enfance.

En France, en 2015, 40% des victimes de violences sexuelles témoignent avoir souffert d’amnésie complète et 60% d’entre elles d’amnésie partielle. Pour 11% des victimes, l’amnésie a duré entre 21 et 40 ans, pour 29% elle a duré entre 6 et 20 ans et pour 42% elle a duré entre 1 et 5 ans.

Or, l’amnésie traumatique suscite une vulnérabilité émotionnelle et un état de stress incontrôlable, mais la victime a surtout de fortes chances de présenter un discours morcelé, discontinu et imprécis. Lorsque l’agresseur nie les faits, l’enquête se résume souvent à un débat paroles contre paroles, et se conclut généralement par une plainte classée sans suite. Ainsi, près de 70% des plaintes pour viol sont classées sans suite, en raison d’un récit trop incohérent pour prouver la réalité des faits et la culpabilité de l’agresseur.

Dans ce cadre, la formation des professionnels de la sécurité et de la justice doit devenir un axe prioritaire, afin de pouvoir accueillir avec bienveillance des victimes en grande vulnérabilité psychique.

Par une évolution du cadre légal afin de faire des violences sexuelles commises en contexte de pornographie, un délit d’incitation à une infraction pénale (viol ou agression sexuelle). C’est notamment ce que recommande le rapport d’information sénatorial « Porno : l’enfer du décor », constatant que les violences systémiques à l’encontre des femmes engendrées par l’industrie de la pornographie sont encore trop peu considérées.

Afin de renforcer l’arsenal pénal, les rapporteurs mettent en avant plusieurs pistes, notamment législatives.
La première serait d’imposer l’insertion, au sein des contenus pornographiques mettant en scène des actes non simulés de viols ou agressions sexuelles, d’un bandeau précisant que les scènes représentées peuvent constituer des infractions criminelles ou délictuelles.
La deuxième reviendrait à renforcer l’arsenal répressif à l’encontre des sites pornographiques diffusant des vidéos dont le contenu relève d’une infraction pénale et qui ne retireraient pas ce contenu après signalement.
La dernière se traduirait par la transposition, aux violences commises dans un contexte de pornographie et à leur représentation non-simulée, l’infraction punie par l’article 421-2-5 du code pénal relative à la provocation directe à commettre un acte terroriste et à l’apologie de ces actes. Il s’agirait d’ajouter au code pénal un délit de provocation à des actes de violence ou d’humiliation sexuelle ou d’apologie de ces actes par le biais de la diffusion d’images d’actes non simulés.

Bibliographie

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