Il est des moments dans l’Histoire où bascule le destin des peuples, des moments qui élèvent les civilisations ou les précipitent dans l’abîme. Nous vivons l’un de ces moments décisifs en Europe en 2024.
Tout, autour de nous et en nous, apparaît fragile, branlant, et à certains égards déjà condamné. La guerre sur notre continent, l’effondrement climatique, la crise sociale, le rejet des institutions, la colère qui gronde et la violence qui se diffuse, la vague d’extrême droite qui s’abat sur nos nations : nous sommes plongés dans ce Chaos que les Anciens Grecs plaçaient à l’origine et à la fin du monde.
La question qui se pose à nous est donc simple : vivons-nous là un début ou une fin? Est-ce le renouveau ou la chute de l’Europe ?
La réponse à cette question existentielle dépend de nous, de notre capacité à conjurer nos peurs, à trancher et à puiser en nous-mêmes l’énergie, les ressources, le courage nécessaire aux grandes décisions et aux grands combats.
Longtemps, le souvenir des crimes de jadis a suffi à légitimer le projet européen. Selon Imre Kertész, « la Constitution silencieuse, implicite de l’Europe, c’est la mémoire, c’est l’expérience du XXe siècle ».
Mais la mémoire s’érode, la « Constitution silencieuse » s’efface et c’est dans les menaces du jour, dans les défis de l’époque que nous devons trouver la raison d’être de l’Union européenne.
Le tumulte actuel pourrait nous conduire à la tétanie, il doit au contraire nous pousser au sursaut et les mots de Hölderlin – « Là où croît le péril, croît aussi ce qui sauve » – doivent guider nos pas. Car c’est en affrontant la possibilité de la mort du projet démocratique européen que nous le redresserons et que nous lui donnerons la vigueur qui lui manque aujourd’hui.
L’agenda « Europe 2030 » que nous proposons n’a rien d’utopique ou d’idéaliste. Il est même profondément réaliste.
Pas au sens, évidemment, que donnent à ce terme les cyniques qui le confondent avec le renoncement aux grandes ambitions et aux grandes luttes. Non, le réalisme dont il est ici question naît du face-à-face avec le chaos, connaît la puissance des idées et exige des transformations radicales.
Assumer la confrontation avec les régimes autoritaires qui traitent nos nations comme des serpillères, sortir des énergies fossiles qui nous asservissent, rompre avec la religion du libre-échange qui nous affaiblit et lutter contre l’explosion des inégalités qui fragilise nos démocraties, voilà ce qui est réaliste en 2024.
Tous les changements proposés dans ce programme visent à faire émerger cette puissance écologique européenne qui seule nous permettra d’ouvrir la possibilité d’un nouveau siècle européen.
Introduction du Programme Réveiller l’Europe avec Raphaël Glucksmann
Les propositions par thématique, cliquer sur l’image pour accéder au document.